Comprendre les étapes du stockage des données en entreprise : le "cycle de vie de la donnée"
La conservation des données personnelles ne se limite pas à un simple stockage : elle suit un cycle précis, encadré par des exigences légales et opérationnelles.
Entre la base active, la base intermédiaire et l’archivage définitif, chaque étape repose sur des principes clés, tels que la limitation de la durée, la sécurité et le respect des finalités initiales.
Cet article explore et vise à définir les différentes phases de conservation des données, de leur utilisation courante à leur archivage à long terme, tout en respectant les obligations du RGPD.
Une gestion maîtrisée des bases de données est non seulement une question de conformité, mais aussi un levier essentiel pour inspirer la confiance. ⬇️
💻 La conservation en "base active"
La conservation en base active désigne le fait de stocker des données personnelles dans une base de données accessible et utilisée au quotidien pour des traitements courants (consultation, modification ou extraction des données).
Ces données sont dites "actives" car elles sont nécessaires pour atteindre la finalité opérationnelle pour laquelle elles ont été collectées.
Exemple concret :
Dans une entreprise, les données des clients (nom, adresse, numéro de téléphone) sont conservées en base active tant que le client est en relation avec l’entreprise ou que cette relation est en cours de gestion (ex. : traitement d'une commande, service après-vente).
Contraintes liées à la conservation en base active :
- Durée limitée : La conservation en base active doit respecter le principe de limitation de la durée, fixé par le RGPD. Une fois la finalité atteinte (ex. : fin du contrat), les données ne doivent plus être accessibles en base active.
- Accessibilité limitée : Quand bien-même ces données sont destinées à être utilisée dans les affaires courantes, seules les personnes habilitées doivent pouvoir accéder à ces données, de manière à reflèter strictement les besoins opérationnels.
- Sécurisation des données : Les bases actives doivent, par principe, être protégées contre les risques d’accès, de suppression ou d'altération non autorisés des données, grâce à des mesures de sécurité proportionnelles au degré de sensibilité des données conservées.
Après la base active :
Quand les données ne sont plus nécessaires pour une utilisation courante, elles peuvent :
- Être supprimées (détruites de manière sécurisée) ;
- Être archivées dans une base intermédiaire (voir ci-dessous ↓) ;
- Être anonymisées pour des usages statistiques par exemple (attention à bien faire en sorte, dans cette hypothèse, que les personnes concernées ne soient plus identifiables).
En résumé :
La conservation en base active correspond au stockage des données dans une base directement utilisable,
mais elle est soumise à des règles strictes de durée et de finalité pour respecter la réglementation sur les données personnelles.
💾 La conservation en base "intermédiaire"
La base intermédiaire(aussi appelée archivage intermédiaire) est une base de données dans laquelle les données personnelles sont conservées après leur passage en base active, mais avant leur suppression définitive.
Ces données ne sont plus utilisées pour des traitements courants, mais doivent être conservées pour répondre à des obligations spécifiques, comme des exigences légales, réglementaires ou la défense d'intérêts légitimes (par exemple, en cas de litige).
Exemple concret :
Une entreprise qui gère un contrat avec un client peut conserver ses données dans une base active jusqu’à la fin du contrat.
Après cela, les données passent en base intermédiaire pour respecter une obligation légale (par exemple, une obligation de conservation des documents comptables pendant 10 ans).
Contraintes liées à la base intermédiaire :
- Accès strictement restreint : Les données en base intermédiaire ne sont accessibles qu’aux personnes ayant un intérêt légitime (par exemple, l’équipe juridique pour un éventuel contentieux).
- Finalités verrouillées : Les données ainsi archivées ne doivent pas être utilisées à d’autres fins par la suite (pour des actions commerciales par exemple). Cela constituerait un détournement de finalités.
- Durée de conservation limitée : Les données doivent être supprimées dès que leur conservation n’est plus nécessaire (par exemple, après l’expiration des délais légaux ou contractuels).
- Sécurisation renforcée : Au même titre que la base active, la base intermédiaire doit être sécurisée grâce à des mesures proportionnelles à la sensibilité des informations conservées. Base active et base intermédiaire doivent être manifestement distinctes l'une de l'autre (grâce à une politique de droits d'accès différente, par exemple).
- Traçabilité des accès : Toute consultation ou extraction des données doit être documentée pour justifier qu’elle respecte les finalités prévues.
Après la base intermédiaire :
Lorsque les données ont atteint leur limite d'utilité administrative ou légale, celles-ci peuvent alors :
- Être supprimées (détruites de manière sécurisée) ;
- Être anonymisées si celles-ci présentent encore un intérêt statistique ou à des fins d'analyses (toujours à la condition que les personnes concernées ne soient plus identifiables) ;
- Dans certains cas très spécifiques, des données peuvent être conservées à des fins d’archivage historique ou patrimonial, à condition que cela soit légalement justifié et strictement encadré (voir ci-dessous ↓).
En résumé :
La base intermédiaire est un espace de stockage temporaire et sécurisé pour des données personnelles qui ne sont plus
nécessaires à l’activité quotidienne, mais qui doivent être conservées pour des raisons légales ou légitimes.
🏦 L'archivage définitif
L’archivage définitif désigne la conservation de données personnelles dans un système spécialement conçu pour préserver des documents ou des informations qui présentent une valeur historique, patrimoniale, ou d’intérêt public (scientifique, par exemple).
Cette pratique est strictement encadrée et réservée à certains acteurs agréés assurant une mission d’intérêt public, comme les services d’archives publiques.
Exemple concret :
Les données collectées par une administration publique (par exemple, des actes d’état civil ou des dossiers judiciaires) peuvent, après leur durée d’utilisation courante et intermédiaire, être transférées dans un système d’archivage définitif pour préserver l’histoire administrative ou sociale.
Contraintes liées à l’archivage définitif :
- Acteurs habilités : L’archivage définitif ne peut être réalisé que par des organismes agréés, tels que les services d’archives publiques (comme les Archives nationales en France), ou, dans certains cas, des organismes privés dûment autorisés par la loi.
- Finalité exclusive : Les données en archivage définitif ne peuvent être utilisées qu’à des fins historiques, scientifiques, statistiques ou patrimoniales. Toute autre utilisation (commerciale, par exemple) est interdite.
- Mission de conservation et de sécurisation : Contrairement à la base active ou intermédiaire, les données archivées définitivement sont conservées sans limite de durée, car elles participent à la préservation de la mémoire collective. Des systèmes robustes de conservation doivent donc être mis en place pour garantir l’intégrité, la pérennité et la sécurité des données archivées, compte tenu de leur valeur à long terme.
- Anonymisation éventuelle : Dans certains cas, pour limiter les risques de ré-identification, les données archivées peuvent être anonymisées, surtout si elles concernent des personnes physiques encore vivantes.
- Encadrement juridique : L’archivage définitif doit être justifié par une disposition légale ou réglementaire, ou par une reconnaissance explicite de l’intérêt public (notamment pour des archives nationales ou scientifiques). Les droits des personnes concernées peuvent être limités dans ce cadre, par exemple, le droit d’effacement n’est pas applicable si les données doivent être conservées pour une finalité légitime prévue par la loi.
En résumé :
L’archivage définitif est une pratique exceptionnelle et réglementée, utilisée pour conserver des données à long terme en raison de leur valeur historique ou d’intérêt public.
Elle est réservée à des acteurs habilités assurant une mission d’intérêt général, comme les services d’archives publiques, et est strictement encadrée pour garantir le respect des droits des personnes et des finalités prévues par la loi.
La gestion des données personnelles, tout au long de leur cycle de vie, doit s’appuyer sur des procédures précisément encadrées et établies à l’avance. Chaque phase de conservation — base active, archivage intermédiaire ou archivage définitif — doit être clairement définie dans le respect des principes de transparence et de bonne gouvernance. Cela implique de déterminer, dès la collecte, les durées de conservation adaptées à chaque finalité, en s’assurant qu’elles soient justifiées et documentées.
Pour garantir une conformité optimale et anticiper les éventuels risques juridiques ou opérationnels, il est fortement recommandé de s’appuyer sur l’expertise d’un Délégué à la Protection des Données (DPO). Celui-ci pourra accompagner les organisations dans l’élaboration et la mise en œuvre de ces procédures, contribuant ainsi à renforcer la confiance des parties prenantes tout en assurant une gestion responsable des données personnelles.
______________________
Article rédigé par Ninon MAIRE, le 10/12/2024
Autres articles susceptibles de vous intéresser
🔗 Les durées de conservation des données : Le tableau PDF complet: Il existe une liste PDF complète des durées de conservation secteur par secteur. Les secteurs couverts sont la prospection commerciale et le marketing, la vente en ligne, les ressources humaines (RH), la comptabilité et les banques, la fiscalité, les documents sociaux, la gestion du système d'information (SI), la mutuelle, les assurances et les services juridiques, et les associations.
🔗 RGPD - Les durées de conservation - Prospection commerciale et marketing: Liste complète des durées de conservation en matière de prospection commerciale et marketing.
🔗 RGPD - Les durées de conservation - Vente en ligne: Liste complète des durées de conservation en matière de vente en ligne.
Le logiciel RGPD du DPO
Les DPO internes, vous disposez de documentations et d’outils intuitifs, permettant la collaboration avec vos équipes.
Les DPO mutualisés et externes (consultants freelance, cabinets d'avocats ou de conseil, institutions publiques), en plus de disposer des mémes fonctionnalités que les DPO internes pour tous vos clients, vous gérez ensemble sur une seule plateforme.